Qui vient de loin (Ewur'osiga). Le Blog d'Alfoncine N. Bouya

« Trop de familiarité tue le respect et l’amitié ». J’ai entendu cette phrase il y a quelques années au cours d’une conférence. La personne qui l’avait prononcée fut prise à partie par tous les participants à la conférence, y compris moi-même. Au fil des années, j’ai pu constater qu’il n’avait pas si tort que ça ! Car, même dans l’amitié, il faut savoir garder une certaine « distance », un certain « recul », beaucoup de respect mutuel. Ce matin, je me suis revue à Ikoumou, village de mon grand-père maternel, là-bas dans la Cuvette congolaise où, enfant, j’allais passer mes vacances.  Ce souvenir qui rejaillit du fond de ma mémoire éclaire pourquoi les Anciens ne laissaient pas les enfants s’approcher du « kanza » (hangar des hommes, situé généralement au milieu de la cour et où se retrouvaient tous les hommes –confirmés- d’une famille ou d’une communauté, non seulement pour partager les repas mais aussi pour débattre de toutes les affaires du village). Au village, la vie sociale se déroulait dans et autour du « kanza ». Les enfants et les jeunes non encore initiés y étaient exclus. Ceci, pour éviter qu’ils n’entendent le pet d’un Ancien et ne sente l’odeur qui l’accompagne (mais pas seulement) et, qu’il ne s’en suive un manque de respect, entorse à l’éthique communautaire. Ce matin, j’entends encore la voix de mon grand-père Kani Itoua L’Ossolo et de mes grands oncles chassant les plus imprudents et impudents d’entre eux qui osaient s’approcher du « kanza » : « Eloigne-toi d’ici au plus vite sinon je te donne une correction ! Quel enfant insolent qui ose s’approcher de notre espace pour entendre et sentir notre pet , ainsi demain il osera nous insulter! »

L’amitié, quant à elle, exige le respect mutuel. Il se trouve que lorsqu’il y a trop de familiarité dans une amitié, la tendance est que le respect s’en trouve peu à peu éroder. Au final, c’est l’amitié qui en prend un coup.

Bonne journée.

Nyélénga