La Vraie Grandeur par Jean Rony Faldor
Bonjour,
Le texte qui suit est de l'intrépide Jean Rony Faldor que certains des Amis de Bric-à-Brac -Maison-d'Affaires connaissent très bien ou ont connu en d'autres circonstances. Sans plus tarder, je lui laisse la parole!
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«Se mettre au service d’une cause plus grande que soi,
telle est l’humilité qui conduit à la vraie grandeur»
Port-au-Prince, 18 décembre 2013
L’apôtre Paul, philosophe benjamite et docteur de la loi, le treizième apôtre, l’apôtre des païens et l’écrivain le plus prolifique de toute La Bible et notamment du Nouveau Testament, adresse cette parole aux chrétiens de la ville de Philippe probablement de sa prison à Rome, et à nous contemporains de ce bas monde d’actualité frappante où la vérité et la justice ne sont plus souveraines et le mensonge universel et caractérisé: « Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus-Christ, lequel, existant en forme de Dieu, n'a point regardé comme une proie à arracher d'être égal avec Dieu, mais s'est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes; et ayant paru comme un simple homme, il s'est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu'à la mort, même jusqu'à la mort de la croix. C'est pourquoi aussi Dieu l'a souverainement élevé, et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père » (Philippiens 2 : 5-11).
Ces textes dégagent un sentiment d’humilité, l’humilité volontaire du Christ. C’est Dieu qui se fait homme et se dépouille de sa gloire pour un temps et un but bien précis. Il est Dieu, sans aucun doute, et il devient serviteur de tous, au service de tous et un en tous. A Jérusalem il se présente sur un ânon comme pour rappeler que même un roi doit vivre humblement. Quel exemple et quelle grandeur! C’est ce sentiment qu’il faut rechercher sans cesse, ce sentiment d’humilité dans nos relations et dans notre vie quotidienne. Pas l’orgueil, qui finit toujours mal; ce sentiment qui a conduit le diable à la chute, et bien d’autres après lui. «Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles », c’est ce que La Bible enseigne. Alors, soyons donc serviteurs les uns des autres.
Mais peut-on être à la fois humble et grand? Le Christ en est l’exemple. Mais voyons l’histoire séculière un petit moment. Dans les «Essais» de Montaigne au septième chapitre «De l’incommodité de la grandeur », nous pouvons en tirer des repères et des constats. Et dans l’histoire contemporaine, l’on peut se permettre de douter qu’il y avait quelqu’un de plus universellement admiré que Nelson Mandela. Peut-être Mahatma Gandhi, autre leader ayant transcendé la politique courante. Ces gens-là ont une trajectoire de vie qui pousse à réfléchir sur la notion de grandeur. Restons-y quelques instants. La grandeur, de quoi est-elle faite? – Comment doit-on évaluer la grandeur d’une personne? – Y a-t-il une grandeur authentique? – Grandeur et mesquinerie font-elles bon ménage? – Qu’est-ce qu’un grand personnage en somme?
Plus nous nous élevons et plus nous paraissons petits à ceux qui ne savent pas voler, disait Nietzsche. Mais, il est aussi indéniable que le génie consiste à avoir un but élevé et vouloir les moyens d’y parvenir. Il faut pouvoir se tailler une existence à ses propres mesures, disait-il, c’est ça au moins la grandeur. Car un grand personnage doit se sentir habité par un destin singulier et être quelqu’un qui se réclame d’une mission historique. Il doit accepter de se concevoir comme un personnage historique, se fixer des buts extraordinairement élevés comme vouloir forger l’histoire et s’en croire capable dirait Facal. Accepter de souffrir au nom de son idéal et être capable de se donner soi-même est la forme la plus élevée de grandeur. Zenman alors eut à dire que c’est cette extériorisation de l’énergie provenant de l’intérieur d’une personne qui détermine sa grandeur. Il ne peut donc y avoir de grandeur dans la facilité. Il faut une part de sacrifice, voire de martyr peut-être, de risques, de douleurs, d’échecs, de détours, de chutes et de désespoir car ce sont ces épreuves qui forgent le caractère qui fonde la grandeur la plus élevée et exige le don de soi. Des qualités de cœur qui donnent une certaine prédisposition pour le service d’une cause plus grande que soi. Réfléchissons un peu sur les cas Mandela et Gandhi.
Personne n’ignore que ce sont des gens qui ont dédié toute leur vie à une cause plus grande que leur intérêt personnel, et ça c’est quelque chose de sublime. Il est vrai qu’ils ont été placés dans des circonstances pénibles et extrêmes qui les ont contraints à faire ces choix extrêmes, mais ils auraient pu faire autrement aussi. Mais non, tous deux ils ont vaincu l’orgueil revanchard. Mandela avait une capacité infiniment trop grande à pardonner. Quoique assez hypothéqué et son devoir de réserve manifeste (un silence sépulcral) durant ses dernières années, il a vécu environ 20 ans après l’apartheid sans avoir pu boucler la boucle. On reconnait que la route est réellement longue et qu’il a parcouru un bon bout de chemin, mais ces mêmes médias qui l’encensent aujourd’hui après sa mort, ils n’ont pas demandé sa libération autour des années 70-80 et l’ont considéré comme un prisonnier politique, condamné à perpétuité, étiqueté de prisonnier de droits communs par Amnesty International. En un mot, c’est ça l’hypocrisie du monde qu’on appelle doctement la diplomatie.
Mandela, tout comme Gandhi, n’était pas parfait. Personne ne l’est. Gandhi a vécu comme un réel échec la division de l’Inde et du Pakistan. Mandela n’a pas non plus complètement réussi à réconcilier population blanche et noire de son pays. La situation de l’Afrique du Sud n’est toujours pas jolie. Les blancs ont encore et toujours peur et les inégalités sont toujours présentes car la situation économique de la majorité noire laisse pantois. L’Inde moderne sombre dans les guerres religieuses et le système caduc des castes. C’est la vérité et il faut le dire, sinon la teinte partisane nous disqualifiera. Cependant, leur parcours est toutefois hors du commun et ils sont de réels grands hommes. Deux grandes figures de l’humanité, deux icones. Les deux ont su faire face à une situation impossible et pourtant triompher. Les deux sont parvenus à leur fin sans recourir à la vengeance alors que la violence était largement utilisée contre eux. Le prestige des deux est universel.
Beaucoup de monde ont atteint les sommets dans les affaires, les arts, la science, le sport, la religion ou la politique et ne sont pas prêts à abandonner leurs vies modernes, luxueuses, confortables et climatisées au profit d’une cause plus grande qu’eux. En général, ce sont des individus qui jugent leur réussite à l’aune des critères extérieurs, tels que la position sociale, l’influence, la popularité, la richesse ou le niveau d’éducation comme dirait Mandela. Ils sont quand même grands pour avoir fait fortune mais pestent contre leurs semblables, maltraitent et surexploitent leurs ouvriers, déshumanisent ceux qui sont à leur charge et n’ont pas conscience de leur finitude, un élément de sagesse indispensable à la grandeur. S’ils jugeraient leur réussite à partir d’autres critères intérieurs comme l’honnêteté, la simplicité, la sincérité, l’absence de vanité et la capacité à servir les autres, ils sauraient combien ils ont gâché leur vraie vie. Donc, on peut dire qu’il y a plusieurs sortes de grandeur et qu’elles ne sauraient toutes être placées sur le même pied. Et comme disait Pigault Lebrun, il y a « une grandeur importune, qui fatigue et blesse le peuple. Il s'en venge ordinairement par la haine, et croit rapprocher les distances, s'il ait droit d'y joindre le mépris. Beaucoup de grands ne connaissent de la grandeur qu'un fardeau au-dessus de leurs forces ». Blaise Pascal lui-même dirait que « les grandeurs naturelles sont celles qui sont indépendantes de la fantaisie des hommes, parce qu'elles consistent dans des qualités réelles et effectives de l'âme ou du corps, qui rendent l'une ou l'autre plus estimable, comme les sciences, la lumière de l'esprit, la vertu, la santé, la force. »
Ce qui fait la grandeur d'un être, ce n'est pas l'étendue de ses connaissances, mais sa bonté, sa lumière, son amour. Albert Camus dirait c’est sa décision d’être plus fort que sa condition. La grandeur d'un homme ne se mesure pas de la tête au pied, ça n'a rien à voir avec sa taille mais de l'écart qui sépare la tête du soleil. Elle ne réside donc pas dans son apparence physique mais dans le rayonnement qui émane de sa personne... c'est ce qu'il fait de sa vie qui va lui donner une réelle dimension de grandeur; son éthique, sa morale, ses actes, son courage, sa persévérance, son honnêteté, sa générosité, son empathie, sa bonne volonté et son grand coeur.
Si tu veux être quelqu’un qui marque ta génération ou l'histoire de ton pays, pastichons un peu la prose de Nietzsche pour te dire que tu dois devenir l’homme que tu es, faire ce que toi seul peux faire, devenir sans cesse celui que tu es et être le maître et le sculpteur de toi-même. La tolérance, l’ouverture d’esprit, l’humilité et le don de soi sont des qualités essentielles à la grandeur qu’il faudra pratiquer tous les jours. Nous devrions tous nous en inspirer pour avoir des idéaux élevés et tenter de nous y tenir. L’honneur appartient à ceux qui jamais ne s’éloignent de la vérité, même dans l’obscurité et la difficulté, ceux qui essayent toujours et qui ne se laissent pas décourager par les insultes, l’humiliation ou même la défaite, dixit Nelson Mandela. Telle est la vraie grandeur!
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